En ce sens que le pourquoi du dispositif sort du terrain où il est apparu, rendu possible... en tous cas rendu possible parce qu’il est là dans ces différentes facettes suivant que les enfants changent etc.
Mais également parce qu’on le prend en compte, ce qui aussi était impossible précédemment, donc il y a une double chose : il est apparu et on l’a pris en compte.
Et pour qu’il soit apparu il y a ma double naïveté : le fait que je n’ai pas fait d’études et le fait que je suis très imprudent dans les choses que je mélange. Et donc il y avait chez moi : ce n’est pas possible que l’on continue tout le temps de fabriquer des règles nouvelles en musique en disant on a été plus loin que l’on n’avait jamais été en terrain inconnu et puis qu’on les codifie chaque fois en disant maintenant ce sont les bonnes, tout le restant était mauvais... c’est totalement aberrant.
Donc la tentative était : est-ce que les enfants peuvent nous apprendre, nous informer quelque part d’une organisation sonore qui n’appartiendrait pas à l’histoire ou que l’on aurait pas été voir ?
I.S. Tu dis qu’à l’origine c’était est-ce que les enfants peuvent nous apprendre sur quelque chose qui est le son ?
Sur l’organisation sonore... Est-ce que c’est progressivement et maintenant que tu dirais qu’ils sont aussi en train de nous en apprendre sur l’éthique comme tu l’as définie ? Quoi donc, pardon ?
Que les enfants... parce que le Tohu-bohu et tout le reste c’est aussi une exploration éthique telle que tu viens de la définir...
Bien entendu, mais l’enfant est éthique par nature puisqu’il est animal... proche de l’animal, et proche d’un comportement où les parents ne lui ont pas (encore) dit : il faut faire ceci et pas cela.
A cet âge là, le rapport éthique c’est donc eux qui nous l’apprennent à ce moment là.
Oui, bien entendu, mais tu dis : on l’a fait pour apprendre des enfants sur la musique...
Non, on l’a fait parce que mon intérêt pour la musique contemporaine qui m’avait fait faire des recherches sur tout ce qui pouvait exister et que je pouvais connaître sur la planète sur les nouvelles organisations sonores non seulement post-wagnérienne, mais également post-Webern, post-Stockhausen, post-boulez m’amenait toujours à quelque chose qui était réjouissant du point de vue de ne l’avoir jamais entendu mais qui n’avait aucun intérêt du point de vue d’un langage nouveau, d’un quelque chose qui posait problème - problème aussi bien pour s’y apprivoiser que pour savoir pourquoi c’était arrivé.
Donc je ne sais pas si il y a une question qui porte sur la musique des enfants alors on pourra voir ce qu’en définitive elle nous apprend, pourquoi est-elle faite etc.
L’autre motivation était le rapport à l’autre, et le rapport à l’autre chez l’enfant qui au lieu d’avoir un rapport à l’autre par la curiosité, par la recherche d’information, de comportement était immédiatement - même avant l’école - pris par rapport à la compétition, par rapport au sport, je rate/je réussis. Si on n’étudie que le piano je suis mieux ou moins bien placé que l’autre...
Avec cette sensation que j’ai eu bêtement toute ma vie, je suis incapable de jouer au échec : si je perds, je râle ; si je gagne, je suis malheureux. Donc je suis incapable de jouer, je ne peux pas en sortir...
Et je pense que tout être normal qui veut chercher un plaisir dans le rapport avec l’autre, dont on veut réveiller le plaisir et donc le désir, ne peut pas se satisfaire d’un rapport dominant/dominé.
Donc il ne peut pas y avoir échec, parce que là c’est lamentable ; il ne peut pas y avoir succès parce que c’est lamentable, les conséquences de ce succès sont la mise en valeur de ce succès. Le succès ne peut qu’être effacé donc il ne faut pas... donc le meilleur moyen du succès c’est de ne pas pouvoir le déceler.
Toute la société est faite pour produire des enfants meilleurs que les adultes... donc en compétition.
L’idée était alors que leur organisation sonore que je ne connaissais pas à l’avance serait en tous cas d’une telle différence ne fut-ce que parce qu’ils ne connaissaient pas les instruments qu’ils allaient manier, mais pas seulement pour cela : l’âge également, que nous ne pourrions pas savoir si c’était bon ou mauvais. Et que eux se regardant et s’écoutant les uns les autres, ne pourraient pas savoir.
Et cela c’est aussi un aspect intéressant de savoir si l’on peut échapper aux modèles et de savoir jusqu’à quel point la culture peut être désossée dans ses fonctions les plus déshonorantes et pas naturellement dans le mot culture qui veut dire que l’on est en état d’apprécier les choses. Donc cela c’était les deux motivations.
Les règles... les règles, elles sont toutes sorties du terrain et pas de notre intelligence. Ce sont toutes des règles qui viennent après expériences.
Je prends la règle des trois minutes de silence : à force d’avoir une situation dans laquelle l’enfant s’exprimait avec grand plaisir et où il allait s’exprimer pendant cinq/dix minutes, on sentait très bien que les autres allaient très mal accepter de rester silencieux pendant si longtemps.
Et il y a un enfant sourd-muet (que tu as très bien connu puisqu’il venait très souvent à la maison) qui un jour en avait marre d’attendre et qui est "rentré" très subtilement, tout doucement avec des sonorités tellement merveilleuses - que peut-être il n’entendait pas, sauf certaines vibrations - et qui était tellement contraire à tout ce qu’il faisait généralement parce qu’il s’éclatait dès qu’il pouvait toucher un instrument : il a donné la règle, tu comprends...
Et ainsi de suite, toutes les règles sont nées... c’est pour cela que je dis qu’elles ont une force interne : en ce sens que si on les modifie, c’est tout le château de cartes qui s’effondre puisqu’elles ont toutes une raison d’être mais qui n’est pas une raison d’être qui fait partie d’un projet. Une raison d’être que le terrain a demandée un moment donné ou que le terrain a indiquée.
Comme il a indiqué par exemple que si il n’y avait pas une fermeture de chaises qui faisait que les instruments se trouvaient dans un espace fermé... le tout s’effondrait, parce que certains enfants allaient jouer dans un coin et qu’à ce moment là c’était des jeux de cour de récréation ou des papotages et que les instruments perdaient... leur efficacité.
A partir du moment où l’on s’est dit on va mettre des chaises partout avec une chaise que l’on déplace au moment où ils entrent et que l’on remet ensuite, il n’y a plus eu l’ombre d’une question que l’on a pu se poser à ce sujet là.
Donc voilà, toutes les règles sont comme cela.
Donc voilà pour les règles. Description du dispositif : je crois qu’il est trop compliqué pour le dire puisque le dispositif sous-entend à partir du moment où l’on cherche à amener les enfants dans le Tohu-bohu, il y a un dispositif jusqu’à présent qui est fait en partie pour que visiblement aux yeux des enfants créer une situation qu’ils n’ont jamais vu ailleurs et à laquelle personne ne pouvait s’attendre tellement elle est incongrue.
Cette incongruité rejoint sans doute chez les enfants tous les tabous, tout ce qu’on leur a interdit de faire puisque dès qu’ils font le moindre son : ils se bouchent les oreilles, ils mettent la main devant leur bouche, ils regardent les adultes... comme si ils avaient pétés. Donc il est clair que le son pour eux - en tous cas cette liberté de le faire comme eux en ont envie - est incongru dans la société dans laquelle ils vivent.
Toutes ces règles sont dues... il fallait d’une part créer une situation où il n’y a pas de références, aucune référence pour les enfants possible. Si un enfant a un piano chez ses parents ou chez sa grand-mère, il va tout de suite reconnaître l’instrument bien sûr mais chez lui il n’y a pas tout ce désordre d’autres instruments, il n’y a pas les boîtes remplies, il n’y a pas... impensable, impensable.
Donc d’une part les règles ont été faites pour amener le Tohu-bohu à se déclencher.
Alors ce n’est que par après que je me suis rendu compte de plus en plus que le Tohu-bohu était une situation où... il me semble que chez James on voit cela extrêmement bien décrit mais dans un autre contexte : l’instant pur du choc que représente une information par rapport à laquelle on n’a pas le temps du recul et qui vous prend justement comme l’instant de pureté absolu.
Et où il est bien évident que l’on ne peut pas rester puisque à partir du moment où on la reproduit il est bien évident que l’on va ou bien tenter de la reconstruire ou bien tenter de la fuir.
Il est évident que ce Tohu-bohu qui est certainement décisif chez l’enfant pour qu’il y ait une rupture par rapport à toutes les habitudes qu’il peut avoir et toutes les morales des sociétés - puisqu’il n’y a plus de morale là : ils peuvent se battre, ils peuvent se rouler par terre etc. - va les amener à mettre en marche les instruments et automatiquement - puisqu’il n’y a pas d’expérience, il n’y a rien - tomber dans ce que l’on a appelé le Tohu-bohu... qui est, je crois, ce qu’il y a de plus proche du chaos, de plus proche du désordre. Ce n’est pas une mise en forme de la matière. Alors qu’est-ce qui fait qu’ils en sortent ?
C’est sans doute que l’on ne peut pas y rester... c’est aussi bête que cela. On ne peut pas rester proche du chaos.
L’important pour moi, et je crois que c’est Wittgenstein qui l’a écrit quelque part, c’est de ne pas le fuir. C’est de savoir quelque part qu’il n’est pas possible et qu’on y a touché mais qu’il n’y a aucune raison de prendre sa queue entre les jambes et de crier au secours comme le fait Attali, comme le font... des tas de gens.
Je pense qu’à partir du moment où les enfants ne crient pas au secours - et on voit très bien qu’ils ne le font pas - et qu’ils tombent automatiquement dans ce que James avait décrit mais Jeanne Hersch également, c’est à dire une recherche de la matière par sa mise en forme puisque l’on ne peut pas y accéder sans la mettre en forme - chacun pour soi ou collectivement puisqu’ils sont très sociables et qu’ils sont dans le groupe. Là il s’agit évidement d’une mise en forme très spéciale puisqu’il n’y a pas de modèle, pas d’appréciation, pas d’exemple puisqu’il n’y a pas de modèle.
Donc c’est, je crois, d’une part l’impossibilité de rester dans le chaos, de rester dans le Tohu-bohu, mais là c’est James qui a décrit pourquoi, et l’impossibilité d’atteindre la matière sans la mise en forme de cette matière. Le plaisir de ces instruments qu’ils ont eu immédiatement les oblige à mettre ces instruments en forme.
De là nous quittons très vite pour chacun des enfants - on ne sait pas très bien à quel moment exactement, il faudrait étudier cela mais c’est assez visible dans le comportement - on va très vite quitter cette période dans laquelle il est tombé effectivement et dans laquelle il ne peut plus retomber - il faudrait quelque part inventer une autre situation, un autre dispositif dans lequel on le piégerait par rapport à l’expérience qu’il a déjà eue par rapport à ce qu’il pourrait imaginer.
Les parents n’ont jamais imaginé cela et on n’a jamais montré cela à un seul parent tellement ils auraient des difficultés à pouvoir le comprendre. On peut même dire que les Tohu-bohu qui sont des moments très intenses puisque de là va partir toute une construction, tout un regard sur eux-mêmes et sur les autres, les Tohu-bohu, on ne peut jamais les remontrer à aucun des enfants. Quel que soit l’enfant, son intelligence...
On peut imaginer alors un vieux philosophe ou une vieille philosophe qui, à soixante ans, pourrait regarder les images de ce qu’il ou elle avait osé faire dans le Tohu-bohu. Mais le Tohu-bohu est tellement proche de la folie, de l’acte absolument non-contrôlé, de la richesse justement de cette folie mais on n’y reste pas.
Quand il est évident que dans la folie on y reste, c’est à dire que la folie telle que Musil l’a décrite dans "L’homme sans qualités" - et c’est peut-être la chose la plus importante de tout son livre - dans l’asile dont je ne sais plus le nom, il y a tout des gens qui vivent leur différence avec la plus grande pureté - sans doute que la pureté est justement la permanence de cet instant de choc tel que décrit par James - mais ils n’en sont pas sortis.
Mais là cela pose quand même problème à la société ; ils n’en sont pas sortis mais ils n’ont pas demandé à en sortir et ils ne savent pas qu’ils y sont, donc les choses vont bien en réalité, simplement cela n’est pas un souhait.
I.S. Les époques de chaos mis en scène cela a existé dans certaines sociétés : le vrai carnaval, les saturnales...
Bien entendu on peut trouver mille références au chaos... mille références au chaos...
Et une chose qui m’a intéressée, c’est que j’avais toujours l’impression que le présent n’existait pas, c’est à dire que nous étions toujours en train de regarder dans le passé et avec des utopies du futur. Ce qui fait que notre situation, tu es ici et moi je suis ici, était toujours coincée, c’est à dire que l’on peut regarder par après mais on ne pouvait pas imaginer l’ombre d’une liberté pour que la situation puisse être différente, c’est une perte de temps, c’est l’idée du cinéma où on peut repartir en arrière et reprendre une autre bifurcation mais au niveau de l’histoire c’est complètement idiot.
Chez Jeanne Hersch, j’ai trouvé ces "moments/instants" qu’elle appelle "miniatures de l’éternité", ces sortes de quelque chose qui passent tout le temps. Elle renverse le problème, elle dit : c’est le plus important, c’est là où se passe réellement l’histoire.
Ces moments ne sont pas des absences, simplement nous n’avons pas la possibilité de les prendre en compte mais ne vous faites pas d’illusions : c’est cela qui est important dans l’histoire humaine.
Et je retrouve là quasi la même chose que James au niveau de la pureté de ce qui nous échappe : purs, parce que justement nous n’avons pas de conscience, pas d’expérience, nous ne pouvons pas reculer face à, donc nous ne pouvons pas être propriétaires de ces instants.
Et pour moi cela me calme beaucoup parce que entre ce que je pensais avant, ce que Hersch me laisse entrevoir comme retournement des choses et ce que James dit, je me dis : bon je suis un petit peu tranquille, je vois un peu plus clair maintenant.
La partition de la partie et du tout, au début, j’ai cru que le Tohu-bohu allait amener des improvisations libres - donc pas du tout dans le sens traditionnel du monde de la musique - et que les enfants allaient vivre des relations aux autres et des expériences qui devraient leur suffire comme incitation à les transposer ailleurs. Puisqu’il ne s’agit pas d’un enseignement, ni d’une morale, ni d’un dispositif pour mener quelque part ; il s’agit d’un dispositif dans lequel chacun y fait se qu’il peut et qui sortant de là, le reproduit, ne le reproduit pas, l’oublie ou pas, c’est pas... c’est difficile d’aller voir.
Et pour moi on faisait cela à trois ans, six ans, neuf ans et douze ans, et il me semblait très intéressant de ne pas poursuivre au-delà de cette expérience d’une année qui donne neuf séances. Parce que le gosse qui a fait l’expérience d’une année et qui a fait un cheminement dans ces neuf séances qui est extrêmement intéressant à voir : prise de conscience justement de ce qu’il peut faire/pas faire, de ce qu’il a envie de faire/pas faire etc.
L’idée qu’il parte pendant ses vacances et qu’on le remette dans la même situation en octobre suivant me paraissait impensable. On ne peut pas d’abord le remettre dans la situation première parce qu’il n’y croirait plus, donc il faudrait raccrocher à ce qui s’est passé là... donc ce n’est pas possible.
Ce qui fait qu’au début, on avait dit et bien ce système de Tohu-bohu, ce système d’improvisations, on le fait à trois ans et on le reprend à six, neuf et douze ans. Et on a quelques expériences assez passionnantes d’enfants de douze ans qui l’avaient eu avant etc. très illustratif. Et quand on a voulu poursuivre justement avec des neuf et douze ans, on s’est tout à fait rendu compte qu’il fallait les intéresser... bien qu’en réalité c’était surtout les professeurs et le milieu qu’il fallait intéresser.
A six ans, du moment que le gosse s’amuse et qu’il ne s’est pas blessé, tout le monde est content ; à neuf ans, on demande des comptes. Et à douze ans on demande encore un peu plus des comptes, en disant qu’est-ce que tu as fait, cela a servi à quoi ?
Donc notre expérience était : avec une école outrée parce que cela ne menait pas quelque part, des parents qui n’étaient pas au courant et une école qui a fait passer la consigne chez les enfants : ce que vous faites est débile. Il est évident que ce qu’ils faisaient était débile, mais c’était... merveilleusement débile : dans le sens carnaval, dans le sens justement d’éclater et de tenter des expériences qui n’étaient pas défendues puisque là on peut tout se permettre.
Mais à douze ans nous étions bien conscients qu’il fallait organiser un jeu, de là est né le "Jeu des parties et du tout", qui est donc tout à fait clair donc sur ce que cela veut dire, et la première grille est apparue. Et c’est très amusant parce que on a commencé trois mois sans grille et vers le mois de décembre on leur a chacun remis dans une enveloppe un grand carton sur lequel il y avait le symbole de la personne qui sourit, de la personne qui pleure et on leur a dit : content/pas content, tu sais comme on fait dans les Novotel, content/pas content, qu’est-ce que vous suggérez... quelques petites questions. Ils ont presque tous demandé un jeu. Ils ont dit on voudrait un jeu.
Donc difficile de dire s’ils étaient poussés par eux-mêmes mais en tous cas les circonstances si on les prend dans toute leur complexité amenaient un jeu. Donc le jeu est sorti et c’était les partitions, et puis alors il a été interrompu parce que les consignes entre ce que j’essayais d’obtenir et les consignes qu’on leur donnait étaient diamétralement opposées et à cette époque là je ne savais absolument plus quoi faire.
La première fois l’idée de la partition c’était avec des explications, tous les gosses recevaient un rouleau d’architecte dans lequel il y avait les partitions, des crayons de différentes couleurs, des explications... à douze ans, ils auraient été capables de lire ou ils pouvaient demander au grand frère etc. Donc l’idée était : vous prenez cela avec vous et vous le ramenez dans un mois... complété comme vous le voulez.
Ils sont tous arrivé un mois après, il n’y en avait pas un seul qui avait le rouleau ! Je soupçonne un petit peu que ce rouleau représentait quelque chose dans lequel ils avaient chargé quelque chose, il y avait les crayons, ils ont eu peur que l’on reprenne le rouleau tandis que je crois qu’à cet âge là j’aurai été d’ailleurs très content de recevoir tout cela. Donc à mon avis cela a joué, mais les professeurs ont dit c’est tellement débile : ils sont tous arrivés en disant "c’est trop compliqué, on n’a rien compris".
Alors là j’ai été un peu pris de court, mais heureusement il y avait des espaces/temps vierges, il y avait les cadres... alors j’ai dit bien, essayons de faire cela ensemble, j’en ai pris deux qui voulaient essayer, tu prends quel instrument ? Et puis quand ils avaient fini, je leur ai dit de jouer et puis j’ai vu leur excitation : tu te souviens de cette aiguille qui était presque terrorisante tellement ils étaient excités pour suivre l’aiguille. Maintenant je sais qu’ils ne sont pas seulement excités pour suivre l’aiguille, que l’excitation c’est aussi suivre un quelque chose qui est un projet inscrit.
Et puis ils ne sont plus jamais revenus parce que la directrice de l’école a fait un accident ou quelque chose comme cela, ils se sont arrêtés, mais cela a été le début des partitions.
Alors les partitions, en vue de cet interrogatoire d’aujourd’hui, je me suis dit mais de quoi s’agit-il ?
Première grille, elle est relativement simple ; deuxième, déjà un petit peu plus compliquée ; et la troisième devient le répons, le fait de jouer à deux puisque la partie qui a été faite sur l’espace/temps deux est reprise sans changement dans la partie supérieure pour qu’un autre enfant fasse le répons, qui permet de regarder - bien entendu, parce qu’ils sont curieux - ce que l’autre à fait et pour lui répondre en faisant la même chose ou en faisant des différences.
Et je me suis dit mais qu’est-ce que c’est que ces trucs là, comment est-ce que je peux expliquer ? C’est culturel ?
J’essaie de dire non, en ce sens que les mots employés ont une consonance culturelle pour les adultes et pourquoi pas ? Les enfants ne le lisent pas et ils s’en foutent complètement. Mais la chose en elle-même est-elle culturelle ?
Et pour finir j’ai du bien dire : oui, elle est culturelle comme une casserole.
A partir du moment où les êtres ne se nourrissent pas en prenant là un fruit et là une feuille, et qu’ils mettent successivement cela en bouche l’un après l’autre, ils ont inventé les casseroles qui sont le lieu dans lequel on peut faire un mélange. La casserole est en même temps la réduction de tous les fruits de toutes les plantes et de tout ce que l’on peut faire comme cuisine.
C’est une réduction du tout possible au niveau de la cuisine, mais c’est quelque chose que les animaux ne font pas.