Grâce à la musique, l’homme reste en relation avec ses origines les plus profondes et les plus anciennes.
La musique permet à l’homme de s’intégrer plus authentiquement dans son milieu, dans son environnement.
Voilà des phrases, souvent lues et entendues, qui témoignent de la recherche de l’homme (post) moderne d’un remède à son aliénation. Les lamentations sur la perte d’une vision intégrée du monde chez l’homme occidental contemporain s’élèvent de tous côtés et, de plus en plus, la musique est invoquée comme un possible antidote : l’expérience musicale n’est-elle pas l’une des expériences les plus fondamentalement unificatrices de l’homme ? Outre la science, qui permet à l’homme d’organiser sa fonction cognitive, l’accent est mis, de plus en plus, sur l’importance de la musique en ce qu’elle permet à l’homme de déterminer sa place dans le monde, tant sur le plan affectif, corporel, mental, spirituel ou érotico-sensuel, que sur le plan cognitif.
En bref, l’idée que la musique soit faire partie des sciences humaines est en train de gagner du terrain. D’autant plus que la musique est devenue l’objet par excellence autour duquel peut s’élaborer une (auto) connaissance multidisciplinaire de l’homme.
Ces dernières années, la musique a été investie par des scientifiques appartenant aux disciplines les plus diverses et on a compris que "faire de la musique" était une activité fondamentalement humaine, indispensable à la compréhension de l’homme et du monde, que "faire de la musique" remplissait une fonction différente mais tout aussi importante que cet autre système de communication humain : le langage.
La musique se situe à la fois à gauche et à droite (je parle ici bien sûr des deux hémisphères du cerveau humain) ; la musique est en rapport avec la raison et avec l’affect ; la musique s’adresse aux capacités réflexives autant que motrices de l’homme ; la musique est l’enfant-chéri de la nouvelle science cognitive ; etc.
Hervé Thys, directeur de la Société Philharmonique de Bruxelles, organise depuis de nombreuses années des séances de sensibilisation à la musique avec différents groupes scolaires. Il ne suit pas les méthodes établies d’une "éducation musicale active" (méthode Orff et autres) et les enfants jouent sur les instruments sans entraînement ni accompagnement : méthode active, donc, mais aussi non conditionnée en ce qui concerne le contenu musical.
Les résultats sont étonnant. Il y apparaît que la musique est l’un des médias d’élection – sinon le média par excellence – permettant une cohabitation humaine civilisée, notamment par la canalisation de la violence. Il me semble qu’une future énonciation d’une éthologie humaine générale ne pourra pas faire abstraction des expériences de Thys. Les expériences de ce qui s’appelle aujourd’hui La Méthode Thys sont poursuivies à l’échelle européenne grâce à une collaboration inter-universitaire, prévoyant des bourses d’études destinées à la recherche.
L’Université Catholique de Louvain et l’Université de Gand participent d’ores et déjà à ce projet pour la Belgique.
Professeur Herman Sabbe
Novembre 1992 (Université de Gand)