Hermann Sabbe - second entretien, le 26 juin 2000
I.S. Sauf que dans d’autres cultures cela c’est produit de tout autre manière, puisqu’il y a quand même des codes qui définissent ce qu’est la musique dans d’autres cultures… disons traditionnelles.
Certainement oui, et c’est là que je pense que l’approche Thys pose quand même des questions.
Bien sûr dans notre culture, dans notre société la musique ne s’apprend pas spontanément comme le langage parlé, par contre dans la langue parlée c’est l’adulte, la mère qui parle à l’enfant qui n’en est qu’au balbutiement, c’est la mère qui parle à l’enfant et qui par là lui propose un modèle à imiter, à suivre… alors que l’approche Thys ne fait pas pareil, ne propose pas… au contraire laisse donc l’enfant au stade du babil dont Hervé Thys parle lui-même.
Donc là oui, je pense qu’il faudra beaucoup y réfléchir, se poser la question de savoir si effectivement comme cela s’est passé et se passe peut-être toujours encore dans certaines sociétés qui ne sont pas la nôtre, si il ne faudrait pas quand même envisager la possibilité de suivre cette voie là qui est de quand même proposer un modèle collectif aux jeunes ?
A ce propos je me souviens d’une anecdote qui m’avait beaucoup frappé à l’époque, cela se passait sur la très belle et bien connue plage de Copacabana à Rio de Janeiro, il y avait là un groupe de noirs brésiliens, ils avaient quelques boites de conserves vides et quelques bouteilles de Coca-Cola… c’était leur batterie, ils se sont mis à faire de la musique extrêmement intéressante, d’une complexité rythmique dont nous occidentaux nous ne pouvons que rêver.
Et ce qui m’a surtout frappé c’est qu’il y avait des tout jeunes, cinq-six ans, ils devaient avoir cet âge là, qui vraiment ont imité le modèle… cela se voyait, j’étais à quelques mètres de là, je me suis permis d’observer cela – et ils se sont mis avec de petits bouts de bois à faire des sons sur les rayures des bouteilles de Coca-Cola, à taper, à suivre le rythme, et même à répondre par un contre-rythme au rythme proposé par les adultes… c’était passionnant.
Ce n’est qu’une anecdote bien sûr mais je pense que cela nous permet de réfléchir à cette question : ne faudrait-il pas quand même une proposition d’un certain ordre de chose même dès l’abord ? Voilà c’est la question que je poserai à Hervé…
I.S. Mais alors il faudrait à ce moment là des fréquences tout à fait différentes parce qu’il est certain qu’en dix séances par an on ne peut pas proposer un ordre des choses avec la même densité que des cultures musicales populaires produisent… ce n’était vraiment pas la première fois que ces enfants avaient entendu ce rythme là certainement…
C’est probable, cela était déjà entré dans leur cerveau, leur mémoire spontanée, c’est vrai…
Il faudrait, si la méthode, si l’approche est acceptée d’une façon plus générale, sans doute effectivement qu’elle soit généralisée dans le temps, qu’elle ne se limite pas à quelques séances événements. A condition donc de vouloir imposer, parce qu’il s’agira d’imposer quand même de nouveau un modèle mais c’est ce qui se passe dans l’apprentissage du langage.
C’est une transmission qui est imposée, qui laisse, comme nous le savons tous, beaucoup de liberté à celui qui utilise la langue, qu’elle soit écrite ou parlée, mais qui part quand même d’un conditionnement. A moins de réserver donc à la musique un rôle culturel complètement différent…
I.S. Apparemment c’est ce qui est en train de se produire puisque l’idée de définir d’une manière ou d’une autre une norme dans nos pays, on ne voit pas d’où cela viendrait et quel type de… on est apparemment dans une diversité… et donc éventuellement le pari de Thys c’est que l’on peut travailler avec cette multiplicité sans code évident…
Oui. Pourtant – je pars du modèle linguistique pour le comparer à la musique – pourtant ce qui d’autre part me fascine, me passionne également dans l’approche Hervé Thys c’est que cela soit la première approche qui traduit dans le domaine pédagogique une pensée musicale qui est celle de Cage disons… une pensée musicale qui semblait être à l’opposé de toute pédagogie.
Si on veut résumer la pensée de Cage – on la trahira certainement si on la résume – mais si on veut le faire, je pense qu’il faut parler du "Vouloir ne pas vouloir". Comment peut-on enseigner "vouloir le non-voulu" ?
C’est pourtant ce que tente de faire l’approche Thys, il me semble, c’est ce qui la lie à la pensée musicale de Cage.
D’une manière plus ou moins consciente ou inconsciente, Hervé a certainement été influencé par cette pensée, d’ailleurs il parle beaucoup de Cage. Donc là, justement ce serait enseigner l’ouverture au monde sonore dans sa totalité sans vouloir ces clivages, ces divisions qui caractérisent notre vie culturelle.
Je pense qu’en très gros nous utilisons trois catégories de signes sonores tout à fait séparés : les signes sonores… la sonnerie du téléphone par exemple, les signes sonores qui font partie du langage admis, de la langue parlée et enfin les signes sonores qui sont autorisés en musique. Ce que propose Cage comme Hervé Thys dans son modèle pédagogique c’est justement de créer cette ouverture à la totalité du monde sonore.
Ce qui est bien différent du monde de transmission du modèle linguistique.
I.S. Y compris là traditionnel, c’est une modification aussi par rapport aux systèmes traditionnels…
Absolument comme je l’ai déjà dit précédemment notre culture musicale a depuis des siècles organisé les choses d’une façon tout à fait stricte, tout à fait en éléments discrets dont on ne peut pas sortir, de manière tout à fait rationnelle… l’apparition d’ailleurs du phonogramme n’a pas amélioré les choses bien sûr, parce que là encore il s’agit de fixer…
D’ailleurs à ce propos, il y a un aspect des séances Thys qui m’intrigue : c’est le fait que tout soit capté.
Le fait que tout soit mis sur vidéo cassette, sur audio cassette, cela me semble aller un peu à l’encontre de la pensée profonde d’où part l’approche Thys… c’est justement de ne rien fixer, de ne rien mettre en boîte.
Donc voilà, je ne m’exprime pas du tout sur cet aspect de la chose, je pose simplement la question.
I.S. Est-ce que dans ce cas enregistrer est-ce fixer dans tous les sens du terme ? Parce que effectivement c’est fixé mais ceux qui le voient sont… ne peuvent pas en tirer une conclusion ou en produire un jugement…
Non je pense que d’ailleurs c’est fort utile que tout cela soit mis en boîte, ces boîtes forment le fondement d’une étude possible, d’une recherche scientifique dans ce domaine et on en voit pas très bien comment on pourrait faire autrement sinon par la fixation audio et vidéo.
Ce sont des documents fascinants et je pense importants justement dans cette perspective d’une véritable recherche d’une nouvelle… d’une possible nouvelle pédagogie musicale. Mais voilà, j’aimais quand même montrer du doigt ces deux choses qui sont quelque peu contradictoires…
D.D. Et le travail avec les partitions…dans un rapport avec Cage. C’est à dire "le vouloir le non vouloir" et un rapport avec une partition où du point de vue de l’auditeur on peut peut-être dire qu’il y a quelque chose d’une expérience cagiene mais où du point de vue de l’enfant et bien que l’on ne sache pas ce que c’est que ce point de vue, mais lorsqu’il note des signes et que lorsqu’on les voit jouer deux fois la même partition on voit très bien dans les exemples que je connais que la deuxième interprétation "ressemble" à la première ; donc quelque part les codes étaient signifiants pour l’enfant… et donc par rapport à Cage ?
Oui, il y a certainement question puisqu’il y a réintroduction d’une intention, d’une certaine intentionnalité de la part de l’enfant qui en principe n’existerait pas dans le premier stade, là il s’agirait d’une liberté d’action complète. Alors que je pense – c’est cela que j’avais déjà souligné la fois précédente si mes souvenirs sont bons – que je n’ai aucun parti pris contre le fait de tenter de réintroduire une forme de graphisme, d’écriture qui peut laisser d’ailleurs beaucoup de latitude.
Je ne sais pas si votre expérience que vous venez de mentionner c’est à dire qu’à deux reprises un enfant avait donc produit plus ou moins le même résultat sonore en partant du même graphisme… je dois dire que cela m’étonne un peu mais c’est intéressant puisque cela tendrait à montrer que même dans un esprit qui n’est pas encore embrigadé par une écriture préétablie il se produit quand même, il se produirait quand même une relation, tout de suite, très vite, une relation presque univoque entre un signe graphique et un résultat sonore à produire à partir d’un signe graphique.
Cela m’étonne un peu parce que je m’imagine – je n’ai donc pas vu ces graphismes – mais je m’imagine que ce sont des graphismes qui n’ont pas du tout la précision qu’à notre écriture musicale occidentale en notes et durées fixées etc.
Donc je penserai plutôt qu’il y a beaucoup plus de latitude là, que le graphisme que l’enfant inscrit ne détermine pas de manière aussi rigoureuse un résultat sonore.
D.D. Ce dont j’ai l’impression c’est que cela produit une recherche de similitude, c’est à dire que j’ai l’impression que l’enfant – je ne suis pas musicien, je ne peux pas décrypter les sons produits mais j’entends clairement que dans la dynamique, la gestuelle de telle chose puis de telle chose, il y a une séquence qui est très claire et qui semble correspondre au graphisme… mais surtout l’enfant – celui-là en tous cas – semble se mettre dans cette recherche de reproduction du "même"…
Et c’était sur quel instrument ? Une sorte de cithare…
Oui, parce que ce qui me frappe dans votre relation de l’événement c’est que vous parlez de paramètres musicaux qui ne sont pas ceux qui dominent la musique classique dans notre culture… vous parlez de volume du son, de timbre, de dynamique, de gestuelle.
Ce sont des paramètres qui, par rapport à notre tradition classique, sont nouveaux. Qui sont devenus très importants dans certaines musiques nouvelles du vingtième siècle mais qui avant cela n’avaient pas voix au chapitre dans notre culture.
Et là justement, j’admet parfaitement que ce soient des paramètres qui peuvent être aussi importants que les autres dans une culture musicale comme la nôtre, les pitch, la hauteur fixée, la durée… mais alors là si ce sont ces paramètres là qui sont les plus importants, qui déterminent vraiment le caractère musicale alors je m’étonnerai du fait que les hauteurs et les durées que l’enfant utilise pour quand même réaliser cette gestuelle et ce dynamisme, qu’elles ne soient pas très différentes.
Et que donc pour notre oreille occidentale cela produirait à mon sens une chose quand même assez différente d’une fois à l’autre…
Voilà j’explique pourquoi votre expérience m’étonne un peu : que cet enfant aie produit une chose qui soit tellement ressemblante d’une fois à l’autre…
I.S. Qu’est-ce que ressembler ?
D.D. Exactement, je dis similaire parce que globalement dans la dynamique et la gestuelle il y a des similitudes mais au niveau des hauteurs, il est peut-être deux octaves plus bas…
Vous n’avez pas l’oreille formée à la manière musicale occidentale, il faudrait demander à un philosophe analytique américain…
I.S. Si je peux me permettre quand Hervé a lu l’ensemble des discussions sur la partition il a insisté et je crois qu’il avait envie d’avoir votre avis à ce sujet là, pour lui c’est encore débutant mais la partition est quelque chose qui peut et doit sur un mode encore à explorer durer sur plusieurs années.
Contrairement à l’approche complètement libre qui lui semble absolument nécessaire pour que les enfants se libèrent de toute leur maniérisme un peu conformiste… pour lui il y a là un temps d’exploration et au fond c’est un peu sa réponse à "totale liberté" ou "codé dès le plus jeune âge".
C’est à dire une voie où les petits humains fabriquent leur signe, on ne leur donne plus les codes dès la naissance mais ce n’est pas une langue érudite comme nos signes musicaux mais on leur donne le temps où… il dit il n’y a pas d’humains sans signes mais donc puisqu’on ne peut plus signifier dès le plus jeune âge on leur donne les moyens de fabriquer leurs propres signes, leur propre sens aux signes, leur propre construction signifiée…
Oui… Bon, je suis tout à fait d’accord pour dire que l’humain, la culture humaine n’existerait certainement pas sans signes mais on imagine parfaitement un monde musical où il n’y aurait que des signes sonores produits directement sans que cela doive nécessairement se traduire en signes graphiques, inscrits, écrits, d’une manière ou d’une autre.
I.S. Oui, mais justement est-ce que pour passer de la production un peu aléatoire du son du Tohu-bohu aux signes sonores, est-ce que cette approche du signe mais qui est absolument non-normée puisque c’est l’enfant qui écrit, qui crée ses propres signes… n’est pas…
Oui mais là est-ce qu’il ne faut pas faire confiance au cerveau humain des plus jeunes où les signes peuvent sans doute se créer à partir de l’expérience sonore collective ? C’est une question que je me pose et à laquelle l’approche Thys plus développée sans doute dans le temps comme vous le dites, pourrait apporter une réponse, un début de réponse.
Mais pour en revenir à la question de la partition, de l’écrit, qui est proposée aux enfants à partir d’un certain moment, il y a là nécessairement une contrainte – elle est beaucoup moins importante que dans l’écriture musicale traditionnelle mais quand même il y a contrainte : il y a quatre paramètres, si je me souviens bien, qui sont indiqués, suggérés à l’enfant qu’il doit donc remplir, que l’enfant doit suivre d’une manière ou d’une autre…
I.S. Sauf que si ils ne le remplissent pas personne ne leur dit, c’est une proposition dont éventuellement ils l’habiteront peu à peu… Si ils dessinent au départ de la neige et l’instrument, simplement de la neige ou de la pluie ou un zigzag, il n’y a personne qui vérifiera qu’ils ont remplis le contrat…
Ce qui m’intéresse surtout dans cette question de l’écriture, réintroduction d’une certaine écriture, c’est de savoir si chaque enfant fait cela pour soi ou s’il s’agit d’une écriture qui soit imposée par un enfant à d’autres enfants ?
I.S. Ce serait difficilement le cas…chacun ne lit que sa propre partition…
D.D. Ils se copient bien l’un l’autre comme dans tous les groupes d’enfants… je n’ai pas vu de deuxième année mais les deux, trois premières fois où ils commencent à faire des partitions de temps en temps ils regardent ce que l’autre fait parce qu’ils ne savent pas trop eux-mêmes mais cela ne semblait pas être un comportement norme…
Il faut peut-être passer par ce stade, il est peut-être inévitable mais cela amoindrirait à mes yeux l’aspect tout à fait utopique que je trouve sympathique dans l’approche Thys, dans son premier stade donc, parce que cette approche nous montre un monde qui n’existe pas, qui n’existe nulle part, et donc parfaitement utopique.
C’est un modèle d’un monde où il y aurait une concurrence zéro, où il n’y aurait pas de production… politiquement c’est tout à fait passionnant de suivre cette pensée, si on la suit jusqu’au bout comme l’a fait Cage dans ses derniers écrits où il conçoit avec une parfaite lucidité les conséquences politiques de sa façon de penser.
Les conséquences politiques, c’est à dire que c’est un monde de pauvreté, de non-emploi assumé, de non-emploi complet, assumé, un monde de pauvreté assumé… ce sont là les conséquences politiques de la pensée de Cage… et je pense de l’approche Thys, si elle pouvait se généraliser dans notre monde culturel. Je pense qu’il faut être conscient de ces conséquences là, il faut aller jusqu’au bout de sa pensée.
I.S. Non emploi vous voulez dire de plus en plus de gens n’ont plus d’emploi et sont pauvres ou…
D.D. Ou personne n’a d’emploi ?
Oui, il faudrait bien sûr voir les modalités d’une telle société… je pense que là aussi c’est de l’utopie parfaite, parce qu’un monde totalement sans production n’est sans doute pas envisageable, donc il faudrait sans doute faire la part des choses, mais cela serait l’ultime conséquence si on voulait vraiment être conséquent en suivant la pensée de Cage.
J’ignore si il faudra que j’en parle à Hervé… je ne sais pas si il a poussé la conséquence jusque là ?
I.S. Pour son compte personnel il adore sa belle voiture… et il roule très vite.
C’est ce qu’il me semblait bien. Donc cela vaut dire que de toutes manières ce stade de la communication écrite, je pense est inévitable à moins de vraiment vouloir bouleverser le monde humain de fond en comble.
Sinon je pense qu’il faut s’accommoder à ce stade de l’écriture et de la communication dans la collectivité d’individus, c’est à dire qu’il y aura de nouveau d’une manière ou d’une autre des hiérarchies qui doivent nécessairement s’établir, je pense.
I.S. Mais est-ce que l’on ne pourrait pas dire que ce que vous disiez tantôt où l’on pourrait viser l’idéal d’un retour à une espèce de bain un peu codant et donc là ce serait le choix de la musique dans la tradition orale où on répète avec autant de liberté que l’on veut, mais comme les conteurs répètent les histoires avec… ou bien tenter de la maintenir dans une tradition écrite qui est une tradition plus expérimentale individuelle mais une écriture disons non-normative, d’essayer de produire des modes d’inscription…
Cela serait déjà très important.
Je voudrais d’abord dire qu’une tradition orale, une transmission uniquement par l’ouïe, par l’écoute, ne veut pas nécessairement dire grande liberté : il y a certaines traditions orales qui sont très rigoureusement codées. Où chaque membre d’une collectivité sait très bien ce que l’on attend de lui, ce qu’il peut produire, ce qu’il ne peut pas produire.
Donc tradition orale n’équivaut pas nécessairement à une plus grande liberté, je pense que dans une transmission écrite il peut y avoir justement beaucoup de latitude, beaucoup de liberté laissée aux musiciens.
Et je pense que c’est peut-être dans ce sens là que l’approche Thys pourra être fructueuse c’est à dire que même au stade de l’écrit elle laisserait subsister cet apport du stade Tohu-bohu de la liberté du premier stade, du non-conditionnement du premier stade qui pourrait peut-être survivre dans un stade de l’écrit qui serait donc conçu d’une manière tout à fait différente de celle de notre manière traditionnelle.
Donc là il faudra patienter, voir ce qui pourra se passer à l’avenir…
I.S. Une des conclusions d’Hervé pour le moment c’est qu’apparemment l’année Tohu-bohu est absolument essentielle pour engager l’expérience partition…
Oui, sinon on renverse à nouveau toute la situation, c’est à dire que l’on repartirait du modèle de l’enseignement musical traditionnel… repartir de l’écrit avant le sonore ce serait de nouveau remettre tout en question, donc ce qui me semble effectivement essentiel à l’approche Thys c’est ce premier stade même assez prolongé où l’enfant entre dans le bain sonore avant d’apprendre éventuellement individuellement ou collectivement à organiser cette masse sonore.
Et là il y a suffisamment de modèles, c’est là que la musique du vingtième siècle, surtout celle de la seconde moitié, nous apporte des tas de modèles absolument passionnant.
J’y pense parce que je prononce par hasard le terme de masse sonore, donc même pour organiser d’énormes masses sonores, cette musique nouvelle, Xenakis, Ligeti et autres, nous ont apporté des modèles. Il y a toutes les partitions graphiques, les partitions verbales de la musique nouvelle de la seconde moitié du vingtième siècle, donc il existe suffisamment de modèle fondamentalement différents du modèle écrit traditionnel qui pourraient inspirer une nouvelle approche.
Je crois d’ailleurs qu’Hervé s’en est clairement inspiré.
D.D. Proposer des partitions déjà écrites aux enfants et leur demander de les interpréter ?
Cela serait un troisième stade effectivement, après un stade intermédiaire où l’enfant écrirait en utilisant des signes qu’il inventerait par lui-même…
I.S. Des signes cabalistiques…
Oui, et puis peut-être quand même si on veut rester dans un monde plus ou moins organisé et pas dans ce monde utopique de la pauvreté dont je parlais, il faudra sans doute intégrer ce troisième stade de l’écrit plus ou moins imposé par les uns aux autres… mais si possible réciproquement.
D.D. Dans les partitions de Cage dont j’ai entendu parler, les interprètes doivent d’abord prendre connaissance de celles-ci, se situer par rapport à elles, faire un travail d’analyse et d’approche exigeant…
Oui, mais il y a beaucoup de…
Cage a proposé tout au long des cinquante ans… il a imaginé une dizaine ou plus de modèles de communication graphique de la part d’un individu créatif à d’autres humains.
Il y a certaines partitions de Cage – cela dépend de la nature du musicien – mais le musicien peut très bien – c’est d’ailleurs un musicologue allemand qui l’a dit, il y a des dizaines d’années – peut sortir de n’importe lequel de ces graphismes cagiens la cinquième symphonie de Beethoven…
C’est un peu exagéré bien sûr, c’est d’une probabilité infinitésimale mais c’est possible. C’est à dire qu’à partir des petits points ou des traits tirés par Cage sur une feuille de papier, on peut fixer des hauteurs, des durées etc. C’est à dire que l’on peut faire un écrit tout à fait traditionnel et reproduire à partir de cet écrit… ce n’est bien sûr pas le sens de la pensée de Cage mais théoriquement c’est possible.
C’est à dire que toutes les musiques jamais faites, cinquième symphonie de Beethoven ou prélude à l’après-midi d’un faune de Debussy, font parties de ce hasard complet qui est imaginé par Cage.
C’est à dire que la possibilité de composer est en même temps l’impossibilité de composer. C’est la portée philosophique de la pensée de Cage…
D.D. N’empêche qu’il compose…
Bien sûr qu’il compose. Oui, ne commettons pas l’erreur comme certains de dire que Cage est un philosophe et pas un musicien, c’est un musicien authentique, un des plus authentiques du siècle.
Mais bien sûr sa pensée a des implications philosophiques absolument étonnantes.
Et dans tous les domaines, dans le domaine de l’économique et du social…
I.S. La pauvreté et le non-emploi cela ressemble… moi j’ai toujours eu… enfin c’est complètement trivial à dire mais il y a une pensée Zen chez Cage, et les moines bouddhistes pratiquent le non-emploi et la pauvreté donc cela serait l’explicitation de la cohérence…
Exactement.
Il y a une attitude de la non-intervention chez Cage qui se rapproche d’ailleurs de certains aspects de ce que l’on appelle le post-modernisme, bien sûr inspirée d’ailleurs comme vous venez de la dire par des philosophies orientales, donc si on poursuit cette voie de pensée et bien on en arrive à un monde nécessairement de pauvreté et de non-emploi. Qui ne serait plus le privilège des moines bouddhistes.
Voyez à quoi nous mène de penser à l’approche Thys, mais c’est l’aspect complètement utopique encore une fois de cette approche.
Et je sens bien comme vous, qu’Hervé lui-même est en train de chercher le chemin qui mènerait vers une situation un peu moins utopique. Où les échanges par le biais des sons seraient beaucoup moins organisés, impératifs que dans notre culture traditionnelle mais où il y aurait quand même certains conditionnements qui… parce que c’est cela la musique, elle nous enseigne, comme l’a dit Attali, si il est possible de vivre en société.
Donc il faut sans doute trouver un mode de communication sonore entre les humains qui soit moins astreignant que ce qui existait dans le monde traditionnel mais où il y ait quand même justement ce fonctionnement social, ce fonctionnement d’une collectivité d’individus qui peuvent justement se comprendre et interagir mutuellement.
I.S. Une des choses qui intéressent Hervé c’est justement que dans notre histoire musicale et artistique en générale, c’est qu’elle a échoué, c’est son échec…
Le monde de la musique classique européenne, occidentale ?
Cela dépend, c’est un peu… je n’inclurais pas dans cela de nombreuses musiques nouvelles du vingtième siècle, je n’aimerais pas les jeter avec Beethoven par exemple.
Que Beethoven ait échoué – quoi qu’il soit un monument absolument incontournable bien sûr – mais que disons l’archétype Beethoven ait échoué, là je veux bien. Surtout si on essaie d’écouter Beethoven comme l’ont écouté ses contemporains, on se rend compte de l’extraordinaire violence de l’égotisme de cette musique. C’est absolument ahurissant : écoutez le final de la fameuse cinquième symphonie, c’est d’une violence, d’un vouloir, d’imposer à l’auditeur… voilà ce que je prétends et vous allez m’écouter. Ce Beethoven là, ce que l’on appelle le dernier Beethoven c’est déjà autre chose, c’est déjà l’hésitation de ne plus vouloir, de ne plus pouvoir imposer. Mais ce que l’on appelle le Beethoven moyen, de la cinquième symphonie, c’est d’une violence… il faut s’imaginer cela, il faut traduire cela dans notre monde actuel, dans la brutalité sonore de notre monde actuel… très bien captée par certains musiciens de tous genres, par Xenakis et par Nono, comme par Jimmy Hendrix.
Imaginez Beethoven avec les moyens sonores d’aujourd’hui, avec les armes d’aujourd’hui…
Alors oui, je dis avec Hervé Thys, que l’archétype Beethoven, que la grande musique classique – qu’Hervé lui-même a programmée pendant des années, quand il était directeur de la Société Philharmonique de Bruxelles – cet archétype a échoué, oui.
J’ajoute une note personnelle : je pense que si j’ai cessé, il y a une trentaine d’année, de me produire en tant que musicien classique professionnel, je n’ai pas tout à fait compris à l’époque où j’ai cessé mes activités de concertistes mais cela a du être cela. J’étais violoncelliste…
C’était ce genre de problèmes, sans que j’en sois très conscient : je n’aurai pas pu à l’époque, il y a trente ans, en parler comme je le fais aujourd’hui.
I.S. Dans le texte, il y a toute une discussion sur cette notion d’œuvre avec la définition que présente Hervé, et que loue au fond Thierry De Smedt, selon laquelle une œuvre en tant que globalité fait que chaque partie locale implique l’ensemble de l’œuvre et que donc il y a donc une virtualité infinie dans les lectures de cet ensemble, et Hervé semble prévoir avec assez bien de satisfaction que l’on puisse très bien se passer d’œuvre en ce sens là… donc ce sens du Tout est dans chaque Partie et le Tout étant dans chaque Partie chaque lecture doit être différente puisque l’œuvre est en tant que telle inépuisable…enfin c’est les deux à la fois.
Oui. C’est la question de savoir quel est le rapport entre une production musicale - quelle que soit : œuvre, jeu ou n’importe quoi - le rapport de cette production musicale à une vision du monde.
L’œuvre bien sûr, philosophiquement parlant, c’est la représentation musicale ou artistique, c’est pareil pour les autres disciplines artistiques, c’est la réflexion, la représentation d’un monde clos, parfait, déterminé. A l’intérieur duquel il peut y avoir beaucoup de rapports différents qui peuvent être interprétés, mais quand même dans son ensemble c’est ce qui qualifie l’œuvre : l’œuvre c’est cette chose close qui – comme le disait Aristote déjà – a un début, un milieu et une fin, qui a un déroulement en musique donc temporel tout à fait établi mais bien sûr à l’intérieur de ce déroulement on peut se poser des questions. Il y a des rapports à établir qui peuvent d’ailleurs être différents à chaque écoute, qui peuvent être différents d’un auditeur à l’autre…
Mais fondamentalement, c’est cela l’œuvre : la réflexion artistique d’un monde bien établi qu’il ne s’agit plus que de représenter. Donc si cela est ce que l’on estime être l’existence du monde… bon, on passera par le relais de l’œuvre ; si c’est d’un autre monde que l’on rêve, l’œuvre n’y aura pas de place. Pas dans le sens où nous l’entendons, pas dans le sens de cette chose qui d’une manière ou d’une autre est fixée.
Bien sûr en musique, au théâtre, il y a encore ces latitudes de l’interprétation de cet intermédiaire qu’est la partition ou le livret qu’il faut encore réaliser – ce qui est un peu différent bien sûr d’autres disciplines artistiques. Mais il y a quand même œuvre, il y a quand même cette chose déterminée en très grande partie, qui représente donc cette idée d’un monde uni. Donc si on se représente l’idée d’un monde différent, il faudra également ne pas s’attacher au concept d’œuvre artistique… c’est d’ailleurs aussi ce que la production artistique au vingtième siècle – surtout durant la seconde moitié, je me répète – a beaucoup fait.
Elle nous a présenté des modèles d’un monde pas aussi certain, pas aussi fixé… bien sûr philosophiquement, il faudrait passer à la question de l’épistémologie : est-ce que c’est parce que le monde ne peut pas être connu par l’esprit humain ? Je n’entrerai pas dans cette discussion : c’est une discussion de spécialistes, je n’ai pas de formation de philosophe, mais c’est la discussion qui à la fin se pose.
D’ailleurs notre culture est assez particulière à cet égard : certainement en musique puisque l’œuvre a été pendant des siècles le paradigme de notre culture musicale. On sait bien aujourd’hui qu’il y a eu d’autres productions musicales dont on ne sait très peu de choses puisqu’elles n’ont pas laissé de traces… soit écrites ou…. Bien sûr la situation est bien différente depuis un siècle à peu près, depuis l’existence du support, du phonogramme.
Qui nous permet de connaître et de plus en plus presque toutes les productions musicales qui se font dans le monde. Donc la situation des sources - pour parler en historien – a totalement changé à partir de ce moment… n’empêche que là de nouveau il s’agit d’une méthode de fixation, fixer les données, fixer la mémoire musicale, donc on retrouve par d’autres moyens la même pensée : l’œuvre, la chose déterminée ; le phonogramme, la chose fixée. C’est le même ordre de pensée.
Et sans doute faut-il trouver – et c’est sans doute l’intérêt de l’approche Thys – un moyen terme, une forme de culture qui permette la compréhension mutuelle entre individus par le biais des sons mais où subsisterait une liberté qui n’est pas laissée par le principe de l’œuvre.
Peut-être ici, je pense qu’il y a encore quelque chose à signaler à propos de la pratique des séances de Tohu-bohu, auxquelles, je le répète, je n’ai jamais assisté. Parce que, ce qui m’a frappé notamment, c’est ce rapport entre jeunes et adultes, et il est question à plusieurs reprises dans les documents – de la part d’Hervé comme d’autres intervenants – il est question d’une absence de jugement de la part des adultes présents, de l’assistance – le mot assistance est déjà intéressant en soi – mais donc non-intervention pour reprendre un terme cagien, mais… j’ai mes doutes à ce propos, à propos de cette absence de jugement.
Donc admettons qu’il y ait non-intervention de la part des adultes, donc certainement à ce premier stade du Tohu-bohu…
I.S. Je crois que pour Hervé cela sera une constante, le non-jugement…
Mais justement, je pense que c’est peut-être un peu naïf… Donc admettons qu’il y a non-intervention de la part des adultes, une non-intervention tout à fait bienveillante.
Je pense que cette attitude des adultes sera quand même interprétée par les enfants : ils estimeront que c’est un jugement, certes un jugement positif d’acquiescement mais un jugement quand même !
D’ailleurs cette relation entre les adultes qui sont présents, qui assistent à ces séances et les enfants, cela me fait quand même beaucoup penser à la relation qui existe entre l’anthropologue, l’ethnomusicologue éventuellement que l’on appelle en anthropologie l’observateur participant, c’est la relation donc entre cet observateur et la peuplade étudiée.
Cela me fait beaucoup penser à cela… ces adultes qui observent ces enfants n’est-ce pas un peu l’anthropologue qui observe l’indigène ?
I.S. A ceci près que les enfants n’ont jamais été confronté à cette situation, tandis que les indigènes sont sensés s’activer comme d’habitude. Donc effectivement les adultes sont aux yeux des enfants responsables de ce qui leur arrive, c’est les adultes qui les ont introduits dans un lieu qui est effectivement un lieu constitué par des adultes tandis…
Oui, mais si vous me permettez dès l’abord il y a cette relation – même si elle est silencieuse, si l’adulte ne s’exprime d’aucune façon, ce qui me semble être assez improbable, on ne s’exprime pas nécessairement par des paroles, ces adultes par leurs attitudes corporelles…
Je ne sais pas, j’ai quand même l’impression qu’il y a un jugement qui s’exprime. Et que les enfants – sans doute pas consciemment – vont quand même saisir, sentir et que donc interpréter comme un jugement. De toutes manières de par la présence des adultes lors de ces séances, même au premier stade, il y a dès l’abord cette relation qui sera finalement quand même déterminante si on passe par plusieurs stades notamment de l’écrit, cette relation qui sera quand même celle d’un jugement nécessairement.
I.S. Mais toi Didier qui a assisté…
D.D. Ce qui est clair pour moi c’est que en tant qu’adultes qui assistent, on s’exprime. Cela c’est clair.
On rit, on participe, on est plus attentif à un moment donné… ce qui est clair aussi dans le même ordre d’idée, c’est que les enfants s’en foutent un peu de ce qui nous arrivent, au bout d’un temps ils ne s’occupent plus de nous…vraiment. Vraiment ? vraiment… je ne dis pas que de temps à autre on ne croise pas un regard, cela arrive. Mais, moi qui suis souvent en train de filmer, je suis dans un statut un peu différent des autres et c’est clair que la caméra cela capte : un enfant qui est en train d’être filmé a tendance à me regarder…
Et à se comporter d’une… Non ? Non ??
Non, je ne crois pas, comme on filme en continu je crois que les enfants oublient assez vite qu’on est là… ils nous sentent cela c’est sûr. Pour moi je crois que si on est avec, si on s’amuse, si on est intéressé etc. ils doivent certainement le sentir. Il doit y avoir des pics d’intensité auxquels on participe évidemment. Simplement je pense que l’attitude de non-jugement elle n’est pas là, elle n’est pas dans la non-participation, elle est dans l’interdiction que l’on se fait de d’intervenir réellement à l’intérieur en sanctionnant et aussi… de toutes façons, l’attitude de non-jugement elle est aussi due à la situation, c’est à dire que ce qui se passe…
Mais est-ce que l’on peut s’empêcher de trouver un moment sonore plus intéressant qu’un autre ? Non, je pense que non…
I.S. Oui, mais cela veux peut-être dire que eux aussi sont en train de le trouver chouette ce moment…
D.D. C’est pour cela que je parlais de "pics". Quand on sort, on se raconte entre nous ce que l’on a perçu de la séance… Mais je pense que l’on peut apprécier quelque chose plus que autre chose - en tous cas moi je le fais et je pense qu’ils le font également – par contre il n’y a rien qui vient sanctionner, rien qui vient renforcer explicitement… si l’enfant sent que de notre côté, l’intensité grandit, il n’y a rien qui va lui dire oui, oui, tu as bien raison c’est à ce moment là que pour nous aussi l’intensité a varié.
Il n’y a rien qui va venir le renforcer ainsi, seule l’interprétation qu’il aura de notre attitude, en tant qu’humain, il voit d’autres humains et corporellement il sait nous analyser.
I.S. Mais il n’aura jamais confirmation redondante…
D.D. Oui, c’est donc plus une sanction qu’un jugement…
Oui, il y a là une question de terminologie qu’il faudrait peut-être…
I.S. Et de ce point de vue là dans leur rapport avec les autres c’est aussi tout le temps le cas, puisque l’un fait quelque chose, qu’il propose à un autre, cette proposition est reçue ou pas, l’autre tourne le dos ou entre… ils sont tout le temps dans des rapports de cet ordre là, il y a tout le temps des rapports d’entre jugement entre eux…
D.D. Et en même temps, il y a quelque chose d’amusant, la situation est tellement chaotique, il y a tellement de choses qui se passent en même temps dans lesquelles il peut y avoir des plages d’ennui assez grand, ennui c’est à dire des moments où il n’y a rien qui accroche, on n’est pas pris par quelque chose, et j’ai l’impression que tout ce qui se passe c’est d’abord de choses qui nous arrivent – même à nous adultes.
C’est à dire que cela ne passe pas par la tête, on n’est pas en train de se dire… non, cela vient après, c’est toujours second. J’ai l’impression que le jugement en terme de rationalité qui s’applique à quelque chose vient toujours après… dans la situation ici c’est vraiment comme si à un moment donné quelque chose rentrait et puis progressivement on se rend compte que c’est ce petit son là, cette chose précise que l’on est en train d’écouter, c’est là que cela se passe pour moi à ce moment-ci.
Et peut-être que c’est cet état d’esprit que décrit l’expression "il n’y a pas de jugement" ? On est dans la situation tout à fait normale du cerveau qui juge de toutes façons toujours après…
Donc sociologiquement parlant, il faudrait peut-être remplacer le terme de jugement par le terme absence de sanction, absence de confirmation de la qualité d’un moment.
I.S. Et cela s’est très clair lorsque dans les premières séances on voit un enfant tenter de faire quelque chose et d’autres qui en même temps se bouchent les oreilles et regardent les adultes… c’est à dire que là visiblement ils sont en train de se prémunir : j’en suis pas… en attendant un véritable jugement sanctionnant. Et c’est cela qui s’efface, quand ils prennent confiance dans le fait que l’adulte ne va pas intervenir tout à coup en disant : ça cela fait trop de bruit etc.
Ils attendent des jugements explicites, toutes leurs mimiques sont des messages explicites aux adultes…soyez confiant, je ne suis pas dupe, je sais que ce n’est pas comme cela qu’il faut faire. Et les adultes ne confirment pas que ce n’est pas comme cela qu’il faut faire…
Oui, oui. Je crois bien que les enfants se libèrent de cette frayeur par rapport aux adultes…
De plus l’être humain doit apprendre à se tenir debout, à marcher mais il ne doit pas nécessairement apprendre à produire un son déterminé d’une façon déterminée, c’est là la liberté que nous donne la musique comprise dans ce sens.
C’est une école de relation humaine cette tentative, et très directe ; très directe et très informelle, très analogique – il n’y a pas le passage par les significations établies de la langue, il y a le rapport, les relations humaines en direct.